1 Juillet 2014
Journal d'une accoucheuse
De Priyamvada N. Purushotham
Titre original : The Purple Line
Roman traduit de l'anglais (Inde) par Éric Auzoux
Éditons Actes Sud - Collection "Lettres indiennes", série dirigée par Rajesh Sharma
Parution en mai 2014 - 254 pages - Prix éditeur : 21,80 €
ISBN : 978-2-330-03202-9
C'est à l'âge de 16 ans, Mrinalini a décidé d'être un médecin qui mettra au monde des bébés. Un choix confirmé lors de ses retrouvailles à la sortie de l'école avec sa grand-mère. Cette grand-mère, cette femme qui a donné naissance à plus d'enfants que quiconque à sa connaissance. Mrinalini reconnaîtra alors le vrai travail d'être un gynécologue : qui concerne "tant la finalité d'une grossesse que son point culminant".
finira alors ses études, rejoindra la faculté de médecine de New Delhi durant 5 ans pour obtenir son diplôme de médecine et de chirurgie avant de rejoindre Londres pour faire sa spécialisation en gynécologie et obstétrique. Elle reviendra dans sa ville natale de Madras lorsque le monde entrera dans le troisième millénaire pour ouvrir une clinique gynécologique à Mylapore, distante de quelques mètres de la maison ancestrale où elle emménagera.
C'est dans cette clinique que des femmes, quelquefois accompagnées de leur belle-mère pour les consultations, se croiseront. Peu importe leur âge, leur culture, leur confession, leurs intentions, leurs rêves.
Parmi elles, Mrinalini nous ouvrira les portes de la vie de six d'entre elles. Elle nous livrera des morceaux de leurs vies d'avant, au présent et au futur. On les suivra pour certaines sur une période d'une dizaine d'années, la plupart réapprendront à vivre malgré les blessures du passé.
On découvrira Zubeida et Megha, l'une de confession musulmane et l'autre jaïn qui se retrouvent toutes deux sous le poids de la tradition et dont leur dernier enfant ne sera pas du sexe désiré. Tulsi et Anjolina qui auront du mal à concevoir et dont leur destin sera intimement lié, l'une seulement connaîtra particulièrement l'autre. Leela et Pooja qui se croiseront un jour déterminant dans la clinique de la gynécologue, l'une donnant la vie et l'autre l'ôtant, l'une dans la fleur de l'âge et l'autre quittant ce monde pour son bonheur dans le monde à venir.
Mais notre narratrice Mrinalini, deviendra également une de ces femmes dont nous suivront des morceaux de sa vie, son compagnon éphémère Sid baroudeur dans l'âme, sa famille vivant aux États-Unis, ses souvenirs, des choix justes lorsque la vie ne donnera pas à ses patientes le sexe de l'enfant tant désiré contrairement à ses collègues, son éthique ...
Priyamvada, l'auteur, nous fait découvrir l'Inde des femmes, émancipées ou non, l'avortement, l'importance du sexe de l'enfant pour certaines mais qui ne doit être découvert qu'à la naissance de ce dernier, "les cliniques de la fertilité" où sont pratiquées des avortements séléctifs, l'abus de certains spécialistes qui informent aux patientes du sexe de l'enfant contre de l'argent, les fausses couches, l'hystércomie, l'adoption ... Mais aussi lorsque la fatalité s'abbat sur elles, elles apprendront à vivre avec et s'épanouieront d'une autre manière avec le temps. Des destins de femmes attachantes à découvrir.
Un roman vraiment agréable à lire, une écriture subtile mais rafraîchissante, ponctuée par des notes d'humour tout en gérant les émotions de l'amour, de la confusion, de l'infidélité et l'impuissance à merveille. Chaque chapitre est parfaitement construit, commençant avec une introduction narrée par Mrinalini et qui nous emporte à la nouvelle découverte d'un fait marquant, d'une année, d'un personnage ; pour ensuite donner le relais à l'histoire d'une des 6 femmes ou à l'histoire de Mrinalini ; tout cela parfaitement orchestré.
Un livre qui n'a rien à envié aux romans mis en avant dans les libraires et que je conseille à un large public de découvrir.
Le titre orignal du livre est "The Purple Line" et se refère aux lignes poupres que l'on trouve sur les bandes des tests de grossesse. Le nom original est très bien trouvé par l'auteur, ce test de grossesse qui lie ces femmes pour leur annoncer soit une enième grossesse, une grossesse non désirée ou pour d'autres que cette fois-ci ce n'est pas la bonne.
Ce livre a été finaliste du Shakti Bhatt First Book Price 2012 récompensant un premier roman indien.
Pourquoi donc l'histoire d'Anjolie est-elle significative ? Pourquoi Megha me touche-t-elle alors que des dizaines de femmes comme elles viennent me voir accompagnées d'un animal préhistorique ? Qu'est-ce que Tulsi a de spécial parmi ces centaines de femmes infertiles ? Et Zubeida ? Comme si elle était la seule à faire des bébés les uns à la suite des autres ! Pourquoi ai-je choisi ces femmes-ci parmi les centaines qui me rendent visite ? Pourquoi raconté-je leurs histoires ? Parce que leurs vies sont entrelacées comme les fibres d'une corde. Quand Zubeida soupirait, à l'autre bout de cette ville hétérogène ; quand Tulsi pleurait, Anjolie riant, et quand Pooja embrassait un monde plein de promesses, Leela était en chute libre.
L'appartement est rempli de fumée. Un feu brûle au centre du salon. Une petite fille dans une jupe de soie verte est assise sur les genoux de son père, qui alimente les flammes de beurre clarifié à intervalles réguliers. Le front de l'homme est oint de cendre, son cordon pend au-dessus des bourrelets de son ventre ; la petite fille pince le cordon entre ses doigts de temps à autre.
C'est son premier anniversaire. Plus tard dans la journée, on percera chacune de ses oreilles afin qu'elles portent les diamants, rubis et émeraudes de sa mère. Un garçon de quatre ans assis à côté de son père fixe les flammes. Il en paraît trois, pas un jour de plus. Il ne semble pas avoir grandi depuis la dernière fois qu'il a observé le feu, lorsque, au lieu de brindilles, on brûlait sa mère.
Journal d'une accoucheuse
Au tournant du siècle, à Chennaï - ex-Madras - la grande métropole du sud de l’Inde, une jeune gynécologue, Mrinalini, ouvre son cabinet. S’y c
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