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Deux ans, huit mois et vingt-huit nuits de Salman Rushdie

On sait très peu de choses, même si on a beaucoup écrit à ce sujet, de la nature véritable des jinns, ces créatures faites de feu sans fumée. Sont-ils bons ou mauvais, diaboliques ou bienveillants, cela fait l'objet d'âpres discussions. Ce que l'on admet généralement, ce sont les caractéristiques suivantes : ils sont fantasques, capricieux, impudiques, ils se déplacent très vite, changent de taille et de forme et réalisent bon nombre de vœux des mortels, hommes et femmes, qu'ils en décident ainsi ou s'y trouvent contraints, et leur perception du temps est radicalement différente de celle des êtres humains.

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Deux ans, huit mois et vingt-huit nuits de Salman Rushdie

Deux ans, huit mois et vingt-huit nuits

De Salman Rushdie

Titre original : Two Years Eight Months and Twenty-Eight Nights

Roman traduit de l'anglais par Gérard Meudal

Date de parution : septembre 2016

Éditions Actes Sud - Lettres anglo-américaines - ISBN 978-2-330-06660-4 - 313 pages - Prix éditeur : 23,00€

Deux ans, huit mois et vingt-huit nuits de Salman Rushdie

En l'an 1195, le grand philosophe Ibn Rushd, autrefois juge de Séville puis médecin personnel du calife fut officiellement discrédité et envoyé en exil. C'est dans les bras de la très jeune Dunia - dunnia signifiant "le monde" - que se consola Rushd. Mais Dunia n'est pas la femme qu'elle prétend être car elle ne vient pas du peuple des humains. Dunia vient d'un autre monde, le Peristan où vivent les jinns et les jinnias. Fille de l'empereur Shahpal, le roi Simurgh qui règne depuis le mont Qâf, Dunia est la plus importante princesse de ce royaume. Profitant d'un rapprochement cyclique entre les deux mondes pour se glisser chez les humains, elle est venue dans l'autre monde pour une aventure terrestre avec une mission bien définie.

De l'union entre Dunia et Rushd naîtront une horde d'enfants reconnaissable à leurs oreilles sans lobes et nommée "Les Dunnia-zat" que l'on pourrait considérer comme une nouvelle tribu, une nouvelle race. Mais ce bonheur fugace prit fin lors de la réhabilitation d'Ibn Rushd à son ancienne charge de médecin après un exil de deux ans huit mois vingt-huit et autant de jours. Selon la légende, Dunia restera encore un certain temps parmi les humains avant de retrouver son monde et que le tunnel spatiotemporel ne se referme. Leurs enfants restèrent dans le monde d'en-bas, engendrèrent des bâtards et peuplèrent à travers les siècles le monde. La majorité aboutirent sur le vaste continent nord-américain et le grand sous-continent de l'Asie du Sud.

Plus de huit siècles et quelques années plus tard et il y a à présent plus de mille ans, l’obscurité gagna le monde d'en-bas en commençant par une tornade dévastatrice. Dès alors, dans le monde des humains, de plus en plus d'étrangetés eurent lieu et de plus en plus fréquemment. Une fissure vient de s'ouvrir entre les deux mondes et des jinns obscures veulent asservir la terre pour de bon, la neutraliser. Il est alors temps pour Dunia de redescendre à la recherche de sa descendance pour combattre le mal qui s’abat dans le monde des humains et ainsi éviter que les humains plonge définitivement dans le côté obscure. L'empoisonnement de son père par les jinns obscures la poussera à une vengeance sans vergogne.

Une lutte, un combat sans merci, une guerre des mondes qui durera deux ans, huit mois et vingt-huit nuits.

Deux ans, huit mois et vingt-huit nuits de Salman Rushdie

"Deux ans, huit mois et vingt-huit nuits" est une fable des temps modernes écrite par le très controversé Salman Rushdie. Comme ses précédents livres, le lecteur retrouve dans ce nouveau roman le style "rushdien", le réalisme magique mêlant fantastique et vie réelle. Très largement inspiré par les "Contes des Mille et Une Nuits" pour composer ce récit, on y retrouve la présence de jinns. Pourtant, ce qu'il marque en premier lieu est la présence d'un théologien rationaliste islamique du nom d'Ibn Rushd connu en Occident sous le nom d'Averroès, un des plus grands philosophes de la civilisation islamique. Un Ibn Rushd, l'aristotéliste, à l'heure où il n'a plus le droit d'exposer sa philosophie et de l'enseigner, dont les écrits, tels ceux de Salman Rushdie des siècles plus tard, ont été interdits et brûlés. On y retrouve également Ghazali, son adversaire très anti-philosophe, responsable depuis l'outre-tombe à la décadence du monde en entraînant à un jinn obscure à commettre les heurts.

"Deux ans, huit mois et vingt-huit nuits" nous ai conté en précisant que les faits mentionnés remonteraient à mille ans alors que Salman Rushdie, sous forme de métaphore, nous conte à sa manière le monde d'aujourd'hui mais avec une vision très apocalyptique et bien sûr très fantastique. En prenant le soin de lire entre les lignes, les sous-couches du roman apparaissent très clairement au lecteur attentif. Bien évidement, comme dans toutes histoires de contes, nous retrouvons d'un côté les bons, la tribu de Dunia composée par une poignée de ses descendants jeunes ou vieux, peu importe leurs origines et leurs antécédents, qui s'engagent dans un combat féroce contre le mal, les méchants incarnés par les jinns obscurs. La morale a également une place très présente au fil du roman.

"Deux ans, huit mois et vingt-huit nuits" est un roman très actuel reprenant les maux du monde interprétés de façon fantastique avec une très grande profondeur philosophique. Je ne vous cache pas que c'est un roman très difficile à lire et qui demande beaucoup d'attention de la part de son lecteur et même beaucoup de motivation. C'est également un roman qui peut diviser par ses préceptes. A chacun donc de voir s'il est prêt à se lancer dans le monde de Salman Rushdie. Pour ma part, je suis parvenue au bout, grâce sans doute au personnage très attachant de Mr Geronimo le jardinier.

Source : The Gardian - Ibn Rushd, détail de la peinture "Le triomphe de Saint Thomas" par Benozzo Gozzoli.

Source : The Gardian - Ibn Rushd, détail de la peinture "Le triomphe de Saint Thomas" par Benozzo Gozzoli.

Comme l'histoire est trompeuse ! Demi-vérités, ignorance, duperies, fausses pistes, erreurs et mensonges et, enfouie quelque part au milieu de tout cela, la vérité à laquelle il est si facile de ne plus croire, et qu'il est donc aisé de qualifier de chimère, en affirmant qu'elle n'existe plus, que tout est relatif, que la ferme conviction de l'un n'est qu'un conte de fées pour un autre.

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